« Pain, without love
Pain, I can't get enough
Pain, I like it rough
'Cause I'd rather feel pain than nothing at all »

« « Bratford ? » Je me retournais vers la secrétaire du cabinet. Une femme assez âgée, l’air hautain. Une femme des bas quartiers ayant épousé un des associés du cabinet. Je m’efforce de paraitre poli en avançant vers elle, mal à l’aise dans mon costume trois pièces. « Monsieur Dewèn a demandé à ce que vous prépariez cette assignation pour 17heures ! » Attrapant le dossier qu’elle me tendait, je lui adressais un sourire forcé puis, me dirigeais vers le bureau que l’on m’avait assigné pour le temps de mon stage ici. Cela faisait déjà près de deux semaines que je travaillais ici et, j’y mettais tout mon cœur. Ce travail, j’y tenais. Depuis que j’étais enfant, je ne rêvais que d’une chose, réparer les injustices, faire en sorte que les parents des autres n’aillent pas en prison, par vengeance, pour ne pas que d’autres enfants ait à connaitre ce que j’ai connu, ce que je connais encore, avoir un père en prison. Je sais que, c’est naïf de ma part, que mon père ait un pourri qui mérite d’être en prison, pour la drogue qu’il a vendu, dans les rues, dans les bars, dans les soirées étudiantes, devant les lycées et, Dieu seul sait où encore… Mais, le manque d’un père, le manque d’une famille stable, cela vous contraint parfois à perdre toute raison. Je voulais aider les autres, aider les enfants subissant des violences, les femmes battues et celles que l’on emprisonnait pour racolage alors qu’elles n’avaient pas d’autre choix que de faire le trottoir pour vivre. Comme ma mère. Bien que ma mère ne soit pas en prison. Ou peut être est ce qu’elle l’est. Qui sait ? Comment le saurais-je ?

Mais, pas aujourd’hui. Aujourd’hui, je n’ai envie d’aider personne et surtout pas… J’ouvre le dossier qui se trouve devant moi, me retrouvant face à une demande de divorce avec jointe, une demande de garde d’enfant. Merveilleux. Encore une famille qui allait exploser. Encore des enfants qui allaient perdre toute stabilité dans leur vie, ballotés entre un père et une mère. De nouvelles vies détruites. Et, il faudrait plaider cela. Indépendamment du bien être des enfants. Seulement pour le bien être de notre client. De notre cliente pardon. Aujourd’hui, je n’avais envie d’aider personne, je n’avais envie de rien, si ce n’est revenir en arrière, avant ce flash qui avait détruit ma santé mentale semble t-il, ce flash qui me donnait envie de tout casser, de tout envoyer valser… Je n’avais pas revue ma petite amie depuis ce moment là. Par crainte qu’elle ne m’annonce ce que j’avais deviné dans ces images de ce que certains disaient déjà être notre avenir. Je voulais me convaincre qu’ils avaient tort. Je ne voulais pas croire qu’elle me quitterait alors que je songeais à la demander en mariage. Je ne parvenais pas à croire qu’elle me laisserait tomber alors qu’elle sait combien j’ai besoin d’elle. J’ai mal, j’ai envie de pleurer. Pourquoi cette femme veut-elle détruire sa famille ? Pourquoi veut-elle quitter son mari ? Ne songe-t-elle donc qu’à elle ? Et ses sentiments à lui, elle y pense ? Ne se demande-t-elle donc pas s’il n’a pas besoin d’elle dans sa vie ? Ne se dit-elle donc pas que peut être que, sans elle, il voudrait seulement mourir ? Je sais que je ne devrais pas faire ca. Je ne devrais pas m’identifier à une de nos affaires. Pourtant, en lisant ce dossier, je n’y parviens pas. Je ne peux qu’imaginer le moment crucial où, alors que j’aurais l’alliance dans ma poche, Quinn m’annoncera que tout est fini entre nous… Mon cœur se sert et, dans un élan de colère, j’envois le contenu de mon bureau valser à travers la pièce, des papiers s’évanouissant partout en voletant, tombant lentement sur le sol aux cotés d’une agrafeuse et de quelques stylos.

Puis, soudain, alors que je me vaudrais en arrière, sur ma chaise, blasé, j’aperçus des pieds bien chaussés au milieu des papiers et autres dossiers du cabinet. Une grimace se dessina alors bientôt sur mon visage tandis que, déglutissant, je découvrais le visage stupéfait de mon supérieur et ami me dévisageant.